Maintenance des Patrimoines
Cours

Durée d'usage des composants

Introduction

La durée d'usage des composants est une combinaison de leur durée de vie réelle (ou brute) et de leur criticité vis-à-vis des fonctions à remplir ; un composant verra sa durée d'usage réduite s'il présente une criticité importante. Cette notion de durée d'usage pourra être illustrée par un graphe reportant en abscisse la criticité et en ordonnée la durée de vie (voir division "Plan de maintenance" - Cours "Définitions des actions de maintenance").

Pour parvenir à ce mode de représentation la procédure suivante est utilisée (schéma pouvant être téléchargé également à l'aide du lien ci-après).

Schéma récap durée usage
Schéma récap durée usage[Zoom...]Info1

Récap Durée Usage

Criticité des composants

Notion de criticité

Criticité des composants

La criticité globale composée avec la durée de vie estimée du composant nous permettra de déterminer la durée d'usage théorique de ce composant et notamment s'il faut envisager son remplacement (gros entretien) ou s'il faut moduler les périodicités de maintenance préventive. Cette composition est définie dans la suite du projet par un graphe de « choix d'actions de maintenance ».

Criticité des composants

La criticité des composants est définie ici à partir de la détermination de la gravité d'un fait ou d'un état ainsi que de sa fréquence d'apparition. Pour déterminer cette criticité, des critères et grilles d'évaluation sont nécessaires.

Chaque composant participant à assurer une ou plusieurs fonctions sera évalué par le gestionnaire suivant deux approches :

  • D'abord, au travers d'une estimation de la « durée de vie résiduelle » du composant en utilisant la méthode dite « des facteurs », issue de la norme ISO 15686 ;

  • Ensuite, au travers de l'évaluation de cinq criticités liées au composant :

    1. Criticité "fonctionnelle" Cfonctionnelle;

    2. Criticité liée au "risque d'obsolescence" Cobsolescence;

    3. Criticité "financière" Cfinancière;

    4. Criticité "environnementale" Cenvironnementale;

    5. Criticité "réglementaire et sécuritaire" Créglementaire.

Ces appréciations se feront par le gestionnaire au regard :

  • Des connaissances techniques générales sur son patrimoine (Dossiers d'ouvrages exécutés, archives techniques, âges des bâtiments, enregistrements des dates de gros entretiens, rondes techniques internes, etc.) ;

  • De son retour d'expérience concernant l'exploitation de la maintenance et de son patrimoine (Bilans comptables de maintenance, enregistrement des pannes et dépenses correctives, identification des équipements « à problèmes », relevés de consommations, etc.) ;

  • De la connaissance des usagers du patrimoine au travers de l'état des lieux défini précédemment (mais également des diagnostics d'usage éventuelles, des lettres de réclamation, demandes de travaux, des rencontres et échanges destinés à faire le point sur les problèmes rencontrés ou les motifs de satisfaction, etc.) ;

  • De la connaissance de l'environnement du patrimoine au travers de l'état des lieux défini précédemment ;

  • Des diagnostics techniques et réglementaires spécifiques réalisés (Missions spécifiques de reconnaissance du patrimoine, diagnostics de performances énergétiques, diagnostics amiante/plomb, contrôles périodiques électriques, etc.) ;

  • Des bases de données concernant les durées de vie de référence des composants issues des données constructeurs ou du retour d'expérience (Base « durée de vie des bâtiments » du CSTB).

Il appartiendra au gestionnaire d'organiser en interne son service ou de faire appel à des compétences externes pour avoir connaissance de tous ces paramètres qui sont indispensables à une gestion active de son patrimoine.

Criticité globale

La criticité globale du composant se calcule de la manière suivante :

La criticité globale associée à la durée de vie estimée du composant permettra de déterminer la durée d'usage théorique de ce composant et indiquera s'il faut envisager son remplacement (gros entretien) ou s'il faut moduler les périodicités de maintenance préventive. Cette composition est définie plus loin par le biais du graphe de « choix d'actions de maintenance ».

Sous-critères de criticité

Chacun des cinq critères principaux est estimé à partir de sous-critères. Une échelle à quatre niveaux permettra d'évaluer chacun de ces sous-critères :

  • Niveau minimal ;

  • Niveau moyen inférieur ;

  • Niveau moyen supérieur ;

  • Niveau maximum.

Chaque niveau se caractérise par une appréciation littérale et une note. Les échelles d'appréciations littérales sont communes à tous les types de profils (destination du bâtiment, type d'usager et d'environnement).

La notation chiffrée de chaque niveau dépendra du profil de l'usager et du bâtiment considéré. En effet, un sous-critère pourrait s'avérer plus important / critique pour un profil donné et donc nécessiter une notation particulièrement élevée ou basse. La tableau ci-dessous illustre un exemple de l'incidence des profilages type sur les valeurs chiffrées de notation en mode simplifié (voir cours "Concept en mode simplifié").

Exemple notation criticité
Exemple notation criticité[Zoom...]Info2

Ces échelles une fois déterminées par le gestionnaire (pour un bâtiment, un usager et un environnement donnés) ne seront plus modifiées, elles restent les mêmes pour l'analyse des criticités de tous les composants constituant le bâtiment.

Le gestionnaire réalisera ce travail de définition des notes par niveau au regard du profilage réalisé concernant la destination du bâtiment, les caractéristiques de l'usager et l'environnement (l'usager et l'environnement se caractérisant tous les deux en terme d'exigences et d'impacts sur le bâtiment).

Chaque sous-critère pourra être évalué par une note se situant entre 0,8 et 1,2. La note de 1 étant attribuée lorsque le sous-critère ne représente aucune criticité particulière ni aucune plus-value par rapport à une situation dite standard.

Le document téléchargeable ci-dessous indique les notations envisagées pour chaque profil de bâtiment et d'usager pour l'ensemble des sous-critères distingués.

Annexe Sous-Criticité

A titre d'illustration, concernant les notations chiffrées différentes d'un profil à l'autre de bâtiment pour une même appréciation littérale. Le sous critère d'obsolescence « esthétique » n° 2 B, fixe comme niveau minimal l'appréciation littérale suivante : [Min 2B] – composant totalement démodé.

L'usager d'un bâtiment standard dont la vocation est essentiellement fonctionnelle n'aura pas de sensibilité particulière concernant ce sous-critère et acceptera sans difficulté un composant démodé, il acceptera une note de 1 sur ce sous - critère car l'esthétique ne représente aucun caractère de criticité pour lui.

En revanche, l'usager d'un hôtel de standing ou d'un bâtiment de représentation, où la notion d'image est essentielle, estimera inacceptable ce composant démodé et appliquera une note de 1,2 qui équivaut à la criticité maximale.

Les tableaux récapitulatifs des différents types de destinations de bâtiment, caractéristiques principales des usagers et de l'environnement du bâtiment pourront servir d'aide au gestionnaire pour cibler les informations à recueillir avant de procéder à la notation des échelles dans le cadre d'un diagnostic d'usage par exemple.

Notation de chaque criticité

Après avoir défini les échelles de notations chiffrées pour chaque sous-critère, le gestionnaire pourra procéder à la notation de chaque composant du bâtiment.

Une application à la criticité fonctionnelle est montrée ici.

Au travers de l'appréciation du gestionnaire suivant les 4 sous-critères considérés, la criticité fonctionnelle sera comprise entre les extrêmes suivants :

  • Cr « fonctionnelle » max = [Min 1A] x [Min 1B] x [Min 1C] x [Min 1D]

  • Cr « fonctionnelle » min = [Max 1A] x [Max 1B] x [Max 1C] x [Max 1D]

Cr « fonctionnelle » max => Criticité maximum

Cr « fonctionnelle » min => Criticité minimum

Combinaisons des criticités

Combinaison criticité
Combinaison criticité[Zoom...]Info3
RemarqueNombre de combinaisons

Pour 4 sous –critères, il existe 256 combinaisons (44) possibles de notations de criticité (s'échelonnant en valeurs allant de Cr max à Cr min).

Notation finale de la criticité "fonctionnelle", sur une échelle de 1 à 5

  • Notes de criticité Cr Min à « seuil 1 » => criticité 5

  • Notes de criticité « seuil 1 » à « seuil 2 » => criticité 4

  • Notes de criticité « seuil 2 » à « seuil 3 » => criticité 3

  • Notes de criticité « seuil 3 » à « seuil 4 » => criticité 2

  • Notes de criticité « seuil 4 » à CR max => criticité 1

Ces seuils et le mode de calcul sont définis dans le cadre du mode simplifié présenté dans la suite du cours.

Notion de décote / surcote

Décote - Surcote

Chaque composant participe à assurer une ou plusieurs fonctions primaires (voir décomposition fonctionnelle du bâtiment).

La notation d'un composant par le gestionnaire suivant les cinq criticités définies (fonctionnelles, risque d'obsolescence, financière, environnementale et règlementaire/sécuritaire) doit également prendre en compte l'appartenance du composant à ces fonctions primaires.

Au travers du profil du bâtiment (destination/usagers/environnement), il est possible de définir un niveau d'exigence associé à chaque fonction primaire assurée.

Nous distinguerons trois niveaux d'exigences liées au profil du bâtiment concernant chacune des huit fonctions primaires :

  • niveau d'exigence inférieur,

  • niveau d'exigence standard,

  • niveau d'exigence supérieur.

ExempleRelation profil - exigence fonctionnelle - criticité

- un bâtiment très exposé aux vents et intempéries (bord de mer) impliquera un niveau d'exigence supérieur sur la fonction primaire « étanchéité à l'eau » ;

- un bâtiment ERP impliquera systématiquement un niveau d'exigence supérieur sur la fonction primaire « accessibilité » ;

- En revanche,à un bâtiment à vocation uniquement fonctionnelle, sans rôle de représentation, correspondra à un niveau d'exigence inférieur sur la fonction primaire « architecture – image ».

Pour tenir compte de l'appartenance du composant à une fonction et pour intégrer l'importance de cette fonction au regard du profil du bâtiment considéré, nous proposons le système de décote / surcote suivant :

  • Si composant Є fonction primaire d'exigence inférieure : => Décote sur toutes criticités : - 0,1

  • Si composant Є fonction primaire d'exigence standard : => ni décote / ni surcote : 0

  • Si composant Є fonction primaire d'exigence supérieure : => Surcote sur toutes criticités : + 0,1

    Ainsi la criticité d'un composant participant à une fonction primaire inférieure se trouve diminuée et celle d'un composant participant à une fonction primaire supérieure se trouve augmentée.

    Le système de décote/surcote des criticités des composants est illustré dans le tableau ci-dessous "processus global de notation des criticités".

Tableau système décote surcote
Tableau système décote surcote[Zoom...]Info4

Vie estimée résiduelle

Il s'agit ici, en utilisant la méthode dite des facteurs, (norme 15686 : « estimation de durée de vie ») de déterminer la durée de vie estimée résiduelle d'un composant (équipement, matériel ou matériau) du bâtiment ou du patrimoine considéré. Cette durée prévisionnelle est appelée ESL (estimated service life).

L'ESL des composants est évaluée ici sur des critères techniques, d'entretien et d'utilisation. L'ESL ne traite pas de l'obsolescence des composants dans la norme 15686. Le risque d'obsolescence au travers des besoins de l'usager est traité au travers des criticités de composants.

L'ESL est déterminée à partir :

  • D'une durée de vie de référence de l'équipement considéré, déterminée à partir des données fournisseurs ou de bases de données issues du retour de l'expérience ;

  • De notations minorantes ou majorantes qui sont fonction de facteurs influençant cette durée de vie de référence.

Les facteurs d'influence

Facteurs

Ces facteurs sont au nombre de sept :

  • Facteur A : niveau de qualité des composants ;

  • Facteur B : niveau de conception ;

  • Facteur C : niveau de réalisation des travaux ;

  • Facteur D : niveau de l'environnement intérieur ;

  • Facteur E : niveau de l'environnement extérieur ;

  • Facteur F : conditions d'utilisation ;

  • Facteur G : conditions d'entretien.

Chaque facteur doit être déterminé pour mettre en lumière les spécificités du composant considéré, ainsi que son environnement et les conditions d'usage qui le distinguent de l'équipement de référence. Généralement, la durée de référence est déterminée dans des conditions dites standard ou moyenne de conception, de fabrication, de mise en œuvre, d'environnement, d'usage et d'entretien.

Cette condition de référence correspond à la valeur 1 de tous les facteurs. Suivant chaque facteur, il convient d'estimer un niveau représentant l'écart existant avec cette situation de référence :

  • Lorsque le niveau est inférieur aux conditions de référence et aura donc un impact négatif sur la durée de vie prévisible du composant considéré, le facteur est noté en dessous de la valeur 1 (exemple : 0,9).

  • Lorsque le niveau est supérieur aux conditions de référence et aura donc un impact positif sur la durée de vie prévisible du composant considéré, le facteur est noté au dessus de la valeur 1 (exemple : 1,1).

La norme ISO 15686 recommande de ne pas dépasser la fourchette de cotation suivante : Minimum : 0,8 et Maximum : 1,2. Ce resserrement de la fourchette évite de donner trop d'importance à un facteur et de conduire à des évaluations incohérentes. Aucune pondération ne doit être appliquée aux facteurs principaux. En résumé, une échelle à trois niveaux permettra d'évaluer chaque facteur :

  • Niveau minimal : MIN ;

  • Niveau moyen ou standard : MOY ;

  • Niveau maximum : MAX.

Une fois les facteurs déterminés, la durée de vie estimée du composant (ESL) est déterminée par multiplication des facteurs et de la durée de vie de référence (RSL) :

ESL = RSL x note A x note B x note C x note D x note E x note F x note G

Lorsqu'un facteur n'est pas pertinent pour le composant considéré, celui-ci n'est pas pris en compte dans le calcul : on lui applique la valeur 1.

Les échelles d'appréciations littérales seront communes à tous les types profils de bâtiment (destination du bâtiment, type d'usager et d'environnement). Des échelles d'appréciation littérale, durée de vie sont proposées dans le fichier téléchargeable ci-dessous.

Annexe Echelle Appréciation Durée Vie

Détail des échelles d'appréciation littérale

Echelles d'appréciation littérale, durée de vie

Les facteurs A, B et C seront appréciés par le gestionnaire en fonction de la connaissance qu'il a du composant en termes de conception, fabrication et mise œuvre. Ces facteurs sont propres à chaque composant et ne sont pas évolutifs. Ce sont des données de base qui doivent figurer dans les dossiers d'ouvrages exécutés et les documentations techniques des fournisseurs ou fabricants. Ces facteurs ne dépendent ni de la destination du bâtiment, ni de l'usager, ni de l'environnement.

Le gestionnaire appréciera chaque facteur en fonction de la connaissance qu'il a du composant en termes de conception, fabrication et mise œuvre.

Une proposition de grille de notation est donnée ci-dessous ; une enquête auprès d'experts professionnels serait nécessaire afin de consolider la proposition.

Concernant les facteurs D, E et F, les notations seront prédéterminées à partir du profilage du bâtiment décrit précédemment (destination, usagers et environnement). Une enquête auprès de professionnels et d'experts nous permettra de définir l'importance des sous-facteurs les uns par rapport aux autres concernant les facteurs E et F :

  • impact des différents sous-facteurs Ea à Eg sur le caractère "agressif" de l'environnement extérieur  ;

  • impact des différents sous-facteurs Fa à Fd sur le caractère "agressif" de l'usager.

Grille notation facteurs
Grille notation facteurs[Zoom...]Info5

Ainsi, il serait plus aisé de définir les notes chiffrées des échelles pour chaque sous-facteur. La difficulté de réalisation de cette enquête repose sur le fait que selon le composant considéré l'importance d'un sous-facteur par rapport à un autre peut varier.

Concernant le facteur G, la durée de vie prévisionnelle du composant est basée sur les conditions d'entretien passées. Dans le cadre de sa politique de maintenance, le gestionnaire aura la possibilité de choisir entre :

  • une maintenance dite minimale lorsqu'il estime que le composant ne justifie pas d'effort de maintenance (fin de vie, composant en attente de remplacement) ;

  • un niveau de maintenance préventive dite standard (équivalent à strictes préconisations du fabricant) ;

  • une maintenance préventive renforcée lorsque le composant le justifie (importance fonctionnelle par exemple).

En décidant de faire un effort d'investissement en maintenance préventive sur un composant, le gestionnaire aura donc la possibilité de prolonger la vie résiduelle théorique de ce composant.

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