Essais de laboratoire
Les essais de laboratoire réalisés sur des échantillons prélevés in situ visent à caractériser les matériaux : identification des sols, aptitude au compactage, caractéristiques mécaniques et hydrauliques. Cette section présente les principaux essais de laboratoire.
Les méthodes et procédures de prélèvement des échantillons sont fixées dans la norme NF EN ISO 22475-1. Deux points sont à souligner :
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pour réaliser les essais sur les matériaux qui constitueront le remblai ou pour les essais d'identification sur les échantillons provenant de la fondation, les prélèvements sont remaniés,
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pour rechercher les propriétés hydromécaniques de la fondation, des échantillons intacts sont prélevés dans des conditions modifiant le moins possible la nature et l'état du terrain.
Les essais d'identification permettent de classer les sols, selon leur granulométrie et leur sensibilité à l'eau. Le guide GTR 2007 propose une classification des sols pour la réalisation des remblais qui s'appuie sur les essais d'identification décrits ci-après et sur l'essai de compactage Proctor (III.2.2.2.). Ce guide couramment utilisé dans le domaine des terrassements est destiné aux remblais routiers ; son utilisation pour les remblais de barrages peut nécessiter quelques adaptations.
La teneur en eau naturelle (wn) est le paramètre d'état essentiel pour caractériser l'état hydrique du sol et pour la réalisation du remblai et de l'obtention de la compacité requise. Le GTR définit 5 classes d'états hydriques : très humide (th), humide (h), moyen (m), sec (s), très sec (ts). Ces états sont définis à partir de la comparaison de la teneur en eau naturelle de la fraction 0/20 mm avec la teneur en eau optimale de compactage (rapport wn/wOPN), ou encore des valeurs de l'Indice Portant Immédiat (IPI - norme NF P 94-078) ou de l'Indice de consistance (Ic – norme NF P 94-051). Suivant les sols et les états à caractériser, le GTR précise le paramètre à privilégier parmi ces trois. L'état d'humidité moyen (m) correspond à l'état le plus favorable pour le compactage du sol considéré et donc son utilisation en remblai. Les états humide (h) et sec (s) sont acceptables sous réserve de respecter des dispositions particulières. Des teneurs en eau très élevées (th) ou très faibles (ts) rendent impossible l'utilisation du matériau en remblai.
La courbe granulométrique (essais par tamisage et sédimentométrie) est fondamentale pour caractériser les sols : elle permet de déterminer les zones homogènes et les hétérogénéités, de qualifier le comportement et d'examiner la représentativité des essais de laboratoire. Plusieurs paramètres granulométriques sont à examiner :
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dimension maximale des plus gros éléments du matériau (Dmax). Ce paramètre est déterminé à partir de la courbe granulométrique ou à défaut par une estimation visuelle. Il est déterminant pour estimer l'épaisseur des couches de remblai et pour définir les moyens de terrassement. Il est également important pour apprécier la représentativité des essais de laboratoire. Le GTR fixe un seuil à 50 mm pour distinguer les sols fins, sableux et graveleux (classes A, B, D1 et D2) des sols grossiers comportant des blocs (classes C et D3). Pour les matériaux rencontrés en montagne comportant souvent des éléments fins et une fraction grossière (sols de classe C, typiquement les moraines), le GTR distingue ceux possédant une importante fraction 0/50mm (sous-classe C1) dont le comportement est assimilable à celui de leur fraction 0/50 mm et ceux possédant une faible fraction 0/50 mm (sous-classe C2) dont le comportement n'est plus assimilable à celui de leur fraction 0/50 mm. Pour les matériaux de la classe C, le GTR propose de préciser l'identification des sols par une caractérisation de la fraction 0/50 mm, qui s'intègre à l'aide d'un double symbole (ex : une moraine de classe C1Bi correspond à un sol C1 dont la fraction 0/50 mm relève de la classe Bi).
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tamisat à 80 μm ou pourcentage de fines. Ce paramètre permet de distinguer les sols riches en fines et d'évaluer leur sensibilité potentielle à l'eau. Le GTR considère que les sols ont un comportement assimilable à celui de leur fraction fine s'ils possèdent 35 % d'éléments inférieurs à 80 μm et qu'un matériau est pauvre en fines s'il possède moins de 12 % d'éléments inférieurs à 80 μm.
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tamisat à 2 mm. Ce paramètre permet d'établir une distinction entre les sols à tendance sableuse et les sols à tendance graveleuse. Le GTR considère qu'au delà de 70 %, le sol est sableux et qu'en deçà, il est graveleux.
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forme de la courbe granulométrique. La forme de la courbe indique l'étalement de la granulométrie d'un sol. Le coefficient d'uniformité (Cu = D60/D10) permet d'estimer l'étalement de la granulométrie : Cu < 3 indique une granulométrie uniforme (ou serrée) alors que Cu > 6 correspond à une granulométrie étalée. Un sol à granulométrie étalée est généralement plus aisément compacté. A contrario, une granulométrie très uniforme (ou très serrée) est un indicateur de difficultés de compactage.
Analogue à la granulométrie mais pour des éléments de dimensions importantes, la blocométrie permet l'analyse de la distribution dimensionnelle des blocs rocheux.
L'indice de plasticité IP est le paramètre le plus utilisé pour caractériser l'argilosité des sols. Cet essai est à privilégier dès que le sol est argileux à très argileux. Le GTR indique trois seuils selon la valeur de l'indice IP :
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12 : limite supérieure des sols faiblement argileux,
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25 : limite supérieure des sols moyennement argileux,
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40 : limite entre les sols argileux et très argileux.
Les limites d'Atterberg permettent de calculer l'indice de consistance qui caractérise l'état hydrique d'un sol par rapport aux limites d'Atterberg : Ic = (wL-wn)/Ip
La valeur de bleu d'un sol (VBS) est également un paramètre permettant de caractériser l'argilosité d'un sol et de certains matériaux rocheux. Le GTR définit plusieurs seuils de sensibilité à l'eau en fonction de la VBS, en particulier :
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0,1 : sol insensible à l'eau en dessous de cette valeur,
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2,5 : seuil distinguant les sols limoneux peu plastiques des sols limoneux de plasticité moyenne,
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6 : seuil distinguant les sols limoneux des sols argileux.
L'objectif de l'essai de compactage est de déterminer les conditions optimales de compactage du sol. L'essai de compactage réalisé en laboratoire pour l'étude des remblais est l'essai Proctor Normal (norme NF P 94-093). L'essai Proctor Modifié correspond à un compactage plus énergétique qui n'est pas recommandé pour les barrages. L'essai Proctor Normal donne la courbe de la masse volumique sèche du matériau compacté en fonction de la teneur en eau de compactage.
L'essai Proctor Normal permet d'apprécier l'aptitude du matériau à être mis en œuvre en remblai.
Deux types d'essais de cisaillement permettent d'estimer les caractéristiques mécaniques des sols : l'essai triaxial et l'essai de cisaillement rectiligne à la boite. Les caractéristiques mécaniques interviennent dans les calculs de stabilité et les essais concernent les matériaux du remblai et ceux de la fondation.
L'essai triaxial est l'essai à privilégier pour les sols fins car il permet de contrôler les pressions interstitielles durant tout le déroulement de l'essai et ainsi de bien connaitre l'état de contrainte du sol testé.
Deux types d'essais triaxiaux sont pratiqués couramment :
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l'essai non consolidé non drainé (UU) donne les caractéristiques apparentes du matériau, notées cu (avec φu=0) pour les sols saturés et cuu - φuu pour les sols non saturés. Elles correspondent au comportement à court terme du sol,
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l'essai consolidé non drainé avec mesures des pressions interstitielles (CU+u), interprété en contraintes effectives, donne les caractéristiques effectives du matériau, notées c' et φ'. Elles correspondent au comportement à long terme du sol.
L'essai de cisaillement rectiligne à la boîte classique ne permet pas la maîtrise des conditions de drainage ni le contrôle de la dissipation des pressions interstitielles au cours de l'essai. Il n'est donc pas adapté pour l'étude des sols peu perméables. Le géotechnicien vérifie la pertinence de l'essai au regard de l'écrêtage du matériau rendu nécessaire par la taille de la boîte.
Des essais hydromécaniques et hydrauliques sont parfois réalisés pour connaître la compressibilité et la perméabilité des terrains rencontrés. Les principaux sont l'essai au perméamètre et l'essai de compressibilité à l'œdomètre.
L'essai au perméamètre, à charge constante ou à charge variable, a pour objet de déterminer la perméabilité d'un sol fin afin de connaître les conditions d'écoulement dans le remblai. La perméabilité d'un sol intervient dans l'analyse des conditions de saturation d'un remblai, en cas de défaillance de la géomembrane pour le cas courant des barrages d'altitude ou pour les remblais sans géomembrane et étanches dans la masse.
L'essai de compressibilité à l'œdomètre est mis en œuvre pour évaluer les tassements d'une fondation ou du remblai constituée de matériaux meubles compressibles. Cette situation reste néanmoins peu courante pour les barrages d'altitude, la fondation étant souvent constituée de terrains incompressibles (moraines raides ou substratum rocheux) après curage des matériaux de couverture.